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"Après avoir réalisé une série de photographies sur le thème de la
chevelure, du corps recouvert par la masse des cheveux (« La femme sauvage », 2001), j’ai repris ce sujet de façon plus dynamique, comme amorce d’un travail récent de vidéo-performance sur le thème de la transe (« Femme qui danse avec ses cheveux », 2009).
Il m’a semblé ensuite intéressant d’en faire le déclencheur d’un travail de sculpture en céramique qui puisse englober les trois approches précédentes : celle de l’énergie du corps laissant des « empreintes » dans la terre, celle des gestes de la création interprétés tel un corps à corps dansé avec l’argile, jusqu’à approcher l’état de transe, celle enfin de la chevelure « déployée » comme une métaphore de l’énergie vitale et de la libération (érotique et créatrice).
Très simplement, j’avais envie de montrer le corps nu dans son rapport et son contact direct et sans tabou avec l’argile, le mouvement libre de ce corps cherchant un défoulement. Cette chorégraphie, mi-instinctive mi-méditée, des déplacements de mon corps dans un espace d’argile vise à la mise en valeur du geste créateur. Elle est pour moi métaphore de l’implication totale de l’artiste dans sa création. Mon corps devient un « outil » tout entier en jeu, de la pointe de mes pieds jusqu’aux terminaisons de mes cheveux. Nue face à la matière (« femme en cheveu », donc dépouillée de tout artifice), je bâtis un « espace à sculpter » composé de trois murs d’argile à échelle humaine (chaque pan de mur mesure 2,80 x 2,80 m).
La vidéo démarre au moment où j’achève de le construire et où je commence à le sculpter avec mes mains et mon corps entier. Chacune des parois devient un haut-relief révélateur des chocs du contact direct, avec leurs lots de traces, empreintes, glissements, ouvertures, percées, écrasements, pressions multiples et contradictoires. Je peux entrer ou sortir du champ d’action, « chercher mes marques », composer des figures erratiques ou raisonnées, et cette recherche « sculpte » progressivement la matière alentour.
D’abord noués, les cheveux sont à la fin libérés par la rapidité et l’énergie des déplacements, le défoulement toujours plus intense, la perte de soi progressive. Mon énergie créatrice et la joie d’être à l’oeuvre constituent les ressorts principaux de l’action, jusqu’à une sincère exaltation proche de la transe, indice de mon implication totale dans une forme de rituel solaire et épanouissant. Le point final de cette performance est le repos et la réflexion.

Ce film va constituer le point de départ de réalisations spatiales à échelle humaine en grès émaillé, projets rendus possibles grâce au soutien de :

  • La Manufacture de Sèvres - Cité de la céramique
  • Manuel Flèche, réalisateur
  • Pierre Grolleau, monteur
  • Iris production"

(Valérie Delarue)

"Chambre d'argile"
Suite à la performance "Corps au travail"
Grès (2.80m x 5.40m x 50 cm)
Vidéo et photos : Manuel Flèche, Pierre Grolleau et Valérie Delarue
Moulin de la Manufacture de Sèvres
Juin 2010